Un projet de relance de moulins dans la vallée de l’Homme, en Dordogne, vient d'être abandonné par les acteurs locaux, pourtant impliqués dans la transition énergétique. L'Etat voulait y imposer des mesures hors sol de continuité écologique, tuant toute faisabilité. Sans parler du mécanisme pervers des subventions publiques qui complexifient sans cesse les cahiers des charges, ôtent tout réalisme aux projets hydro-électriques locaux et mènent à une inertie complète, faute de visibilité ou de rentabilité. Voilà comment on fabrique des gilets jaunes, par le matraquage réglementaire permanent d'une administration prisonnière de visées idéologiques ou technocratiques, oubliant qu'elle existe pour rendre service aux populations, et non pas les punir ou les harceler. Il faut sortir de cet étouffoir bureaucratique des territoires. Vite.
C'est le journal Sud-Ouest qui révèle l'affaire dans son édition locale. La communauté de communes de la vallée de l’Homme (CCVH) avait signé une convention dans le cadre de l'appel d'offres lancé par Ségolène Royal en 2017. La CCVH devait alors toucher 504 000 euros pour remettre en fonction deux moulins du Bugue et des Eyzies pour la production d’énergie hydroélectrique.
La CCVH est reconnue "territoire à énergie positive pour la croissance verte (TEPCV)" et très impliquée dans la prévention du réchauffement climatique.
Nous avions mis en garde dès 2016, à propos de cet appel d'offres de l'Etat sur l'hydro-électricité. L'intention de Ségolène Royal était bonne, mais l'administration centrale tend à perdre toute mesure et tout bon sens dans ses attentes. Nous écrivions à l'époque: "Il reste cependant beaucoup de progrès à faire : l'administration française est traditionnellement plus à l'aise avec la grande industrie qu'avec les petits producteurs, elle a du mal à dimensionner ses exigences et ses réglementations à la réalité des chutes les plus modestes."
Les faits nous ont ici donné raison.
Pourquoi le projet de la CCVH a-t-il capoté ?
Le journal observe : "Très ancien, le moulin sur la Beune, aux Eyzies, est devenu producteur d’énergie dès le début du XXe siècle avec 17,8 kW/h pour un débit de 360 litres par seconde. Le nouveau projet prévoyait l’installation de deux turbines de 14 kW/h, celles-ci ayant une meilleure efficacité. D’un coût de 220 000 euros, il bénéficiait d’une subvention de 100 000 euros. La préfecture avait accepté ce dossier, mais la Direction départementale des territoires, qui assure la police de l’eau, a imposé des conditions, comme la création d’une passe à poissons (bien que cette retenue soit submergée régulièrement par les crues de la Vézère), d’un coût de 150 000 euros, et la limitation du prélèvement d’eau, réduisant la production électrique."
De plus, comme le projet avait une aide pour la partie électrique, les nouvelles réglementations font qu'il n’est plus éligible à celle associée à la continuité écologique (60 % au départ). Au final, le projet est abandonné.
Ce cas résume les effets pervers du système actuel trop jacobin, trop complexe, trop hors-sol.
Rien n'y fait, rien ne change.
L'administration centrale continue d'ergoter des changements de détail pour une réforme rejetée sur de nombreux sites pour ses nuisances.
Faut-il désormais enfiler un gilet jaune et occuper les préfectures pour que de telles dérives cessent?
Si cette technocratie jacobine ne se réforme pas de toute urgence et n'arrive pas à entendre les objections des citoyens, de leurs associations et de leurs élus, le pays court vers une aggravation majeure des fractures territoriales sur fond de perte de légitimité de l'Etat. Tous ceux qui, depuis l'administration centrale et ses représentations en régions, poussent les gens à bout de leur patience en porteront la responsabilité.
C'est le journal Sud-Ouest qui révèle l'affaire dans son édition locale. La communauté de communes de la vallée de l’Homme (CCVH) avait signé une convention dans le cadre de l'appel d'offres lancé par Ségolène Royal en 2017. La CCVH devait alors toucher 504 000 euros pour remettre en fonction deux moulins du Bugue et des Eyzies pour la production d’énergie hydroélectrique.
La CCVH est reconnue "territoire à énergie positive pour la croissance verte (TEPCV)" et très impliquée dans la prévention du réchauffement climatique.
Nous avions mis en garde dès 2016, à propos de cet appel d'offres de l'Etat sur l'hydro-électricité. L'intention de Ségolène Royal était bonne, mais l'administration centrale tend à perdre toute mesure et tout bon sens dans ses attentes. Nous écrivions à l'époque: "Il reste cependant beaucoup de progrès à faire : l'administration française est traditionnellement plus à l'aise avec la grande industrie qu'avec les petits producteurs, elle a du mal à dimensionner ses exigences et ses réglementations à la réalité des chutes les plus modestes."
Les faits nous ont ici donné raison.
Le journal observe : "Très ancien, le moulin sur la Beune, aux Eyzies, est devenu producteur d’énergie dès le début du XXe siècle avec 17,8 kW/h pour un débit de 360 litres par seconde. Le nouveau projet prévoyait l’installation de deux turbines de 14 kW/h, celles-ci ayant une meilleure efficacité. D’un coût de 220 000 euros, il bénéficiait d’une subvention de 100 000 euros. La préfecture avait accepté ce dossier, mais la Direction départementale des territoires, qui assure la police de l’eau, a imposé des conditions, comme la création d’une passe à poissons (bien que cette retenue soit submergée régulièrement par les crues de la Vézère), d’un coût de 150 000 euros, et la limitation du prélèvement d’eau, réduisant la production électrique."
De plus, comme le projet avait une aide pour la partie électrique, les nouvelles réglementations font qu'il n’est plus éligible à celle associée à la continuité écologique (60 % au départ). Au final, le projet est abandonné.
Ce cas résume les effets pervers du système actuel trop jacobin, trop complexe, trop hors-sol.
- Le ministère lance des appels à projets "petite hydro-électricité" en pensant qu'un site artisanal de petite puissance peut répondre aux mêmes cahiers de charges qu'un grand barrage d'industriels à forte capacité capitalistique. C'est évidemment décalé et, sauf cas très favorable de sites demandant peu de travaux, impossible. L'Etat français raisonne depuis Paris par et pour les "gros", il charge sans cesse la barque des exigences, il rend du même coup la vie impossible aux "petits".
- Les subventions des agences de l'eau (dont les programmations sont largement le fait des services des préfectures de bassin préparant tous les textes) sont prioritairement orientées vers la casse du patrimoine hydraulique, l'argent public des Français nourrit un idéal intégriste de la "rivière sans humain" qui n'est nullement partagée dans le corps social et ne représente en rien une forme d'intérêt général, juste une vision particulière avancée par certains lobbies. Sans grande surprise, l'argent public que l'on préfère dépenser pour les besoins des poissons manque ensuite pour les projets des humains.
- Les mesures dites de continuité écologique représentent une ruine pour les particuliers et pour les petits producteurs : sans subvention publique à 80 ou 100%, elles sont inapplicables. Le revenu moyen d'un petit site hydro-électrique (par les tarifs de rachat aux ENR bas carbone), c'est environ 800 € du kW de puissance nette installée. Cela veut dire qu'un moulin d'une puissance de 20 kW (cas assez commun) ne pourra espérer qu'un revenu de l'ordre de 16 k€ par an. Revenu annuel sur 20 ans de contrat de rachat, mais sur lequel il faut bien sûr payer les impôts, les taxes, rembourser le matériel (turbine, génératrice) ainsi que le coût de chantier (génie civil raccordement). Les marges sont donc en général faibles, les 10 voire 15 premières années servent à payer le projet. Or, les demandes de l'administration sont de l'orde de 10 ans de chiffres d'affaires : aucun secteur ne peut évidement affronter de telles règles, c'est un non-sens économique complet. En proportion, c'est comme si l'on demandait à la division EDF Hydro de dépenser 50 milliards € pour la continuité écologique!
- Au final, rien ne se passe. Au lieu de chercher des projets simples, en financement privé ou en partenariat privé-public, avec des demandes écologiques proportionnées à l'impact et au chiffre d'affaires (donc modestes dans le cas des moulins), on monte des usines à gaz qui se perdent en réunions et en rapports sans fin, pour s'achever dans l'inaction, avec de l'argent et du temps dépensés à pure perte.
Rien n'y fait, rien ne change.
L'administration centrale continue d'ergoter des changements de détail pour une réforme rejetée sur de nombreux sites pour ses nuisances.
Faut-il désormais enfiler un gilet jaune et occuper les préfectures pour que de telles dérives cessent?
Si cette technocratie jacobine ne se réforme pas de toute urgence et n'arrive pas à entendre les objections des citoyens, de leurs associations et de leurs élus, le pays court vers une aggravation majeure des fractures territoriales sur fond de perte de légitimité de l'Etat. Tous ceux qui, depuis l'administration centrale et ses représentations en régions, poussent les gens à bout de leur patience en porteront la responsabilité.