L'aqueduc et les moulins de Barbegal constituent un complexe romain de meunerie hydraulique situé à Fontvieille, à proximité (7 km) de la ville d'Arles, non loin du moulin d'Alphonse Daudet. Cet ensemble a été construit au début du IIe siècle siècle de notre ère et forme la première grande usine hydraulique connue de l'histoire, avec 16 roues de moulins. Une équipe de chercheurs vient de suggérer que la production de cette usine à eau était probablement destinée à l'exportation de biscuits de mer (Panus nauticus) pour les marins, et non à la consommation locale.
Le vallon des Arcs en amont du complexe de Barbegal est franchi par deux ponts aqueducs parallèles sur arches. Ce dispositif résulte de modifications sur l'aqueduc d'Arles, dont la branche orientale fut détournée pour alimenter la meunerie de Barbegal. L'eau conduite dans l'aqueduc actionnait deux séries de huit roues verticales à augets, disposées de part et d'autre d'une allée centrale. Il s'agissait de roue de dessus, fonctionnement par remplissage d'augets et utilisation de l'énergie gravitaire.
Les roues de Barbegal fournissaient l'énergie à des moulins à farine. L'usage cette mouture reste débattu (alimentation de la ville d'Arles, exportation pour des garnisons...).
Dans un travail venant de paraître, cinq chercheurs (Gül Sürmelihindi, Philippe Leveau, Christoph Spötl, Vincent Bernard et Cees W. Passchier) suggèrent une production de biscuits :
"Les dépôts de carbonate précipités à partir de l’eau pendant le fonctionnement des moulins, formant des moulages sur le bois. Ces moulages sont préservés et fournissent des informations uniques sur la fréquence d'utilisation et de maintenance des moulins, et même sur la structure des chambres de la roue hydraulique. Les séries chronologiques d'isotopes stables des gisements de carbonate révèlent que l'activité de l'usine était régulièrement interrompue pendant plusieurs mois. Cela suggère fortement que le complexe de la minoterie n'était pas utilisé pour fournir régulièrement de la farine à un grand centre de population, comme on le pensait auparavant, mais servait probablement à produire du biscuit de mer non périssable pour les ports à proximité."
Barbegal a été désigné comme "la plus grande concentration connue de puissance mécanique du monde antique" (Greene 2000)
Et pourtant, selon nos critères modernes, cette usine antique avait une puissance très modeste.
Le débit de l'aqueduc a été estimé entre 240 et 1000 litres par seconde. Le dénivelé exploité par les moulins est de 18 mètres. La puissance maximale brute de l'aménagement devait être de l'ordre de 50 kW, la puissance nette encore moindre en raison de pertes de charge dans les goulottes d'amenée et les roues. Il a été proposé une puissance efficace de l'ordre de 32 kW et une capacité quotidienne de production de 4,5 tonnes de mouture (Sellin 1983).
A titre de comparaison, le barrage le plus puissant de France (Grand-Maison en Isère) aune puissance de 1 800 000 kW, soit 30 000 fois supérieure. On voit combien nos économies modernes dépendent d'un usage intensif de l'énergie par rapport au monde antique, ou féodal (voir le remarquable essai de Smil 2017).
Références :
Sürmelihindi G et al (2018), The second century CE Roman watermills of Barbegal: Unraveling the enigma of one of the oldest industrial complexes, Science Advances, DOI: 10.1126/sciadv.aar3620
Greene K (2000), Technological Innovation and Economic Progress in the Ancient World: M.I. Finley Re-Considered, The Economic History Review, New Series, 53, 1, 29-59.
Sellin RHJ (1983), The large Roman water mill at Barbegal (France), History of Technology, 8, 91-109
Smil V (2017), Energy and civilization. A history, MIT Press, 552 p.
Le vallon des Arcs en amont du complexe de Barbegal est franchi par deux ponts aqueducs parallèles sur arches. Ce dispositif résulte de modifications sur l'aqueduc d'Arles, dont la branche orientale fut détournée pour alimenter la meunerie de Barbegal. L'eau conduite dans l'aqueduc actionnait deux séries de huit roues verticales à augets, disposées de part et d'autre d'une allée centrale. Il s'agissait de roue de dessus, fonctionnement par remplissage d'augets et utilisation de l'énergie gravitaire.
Les roues de Barbegal fournissaient l'énergie à des moulins à farine. L'usage cette mouture reste débattu (alimentation de la ville d'Arles, exportation pour des garnisons...).
Dans un travail venant de paraître, cinq chercheurs (Gül Sürmelihindi, Philippe Leveau, Christoph Spötl, Vincent Bernard et Cees W. Passchier) suggèrent une production de biscuits :
"Les dépôts de carbonate précipités à partir de l’eau pendant le fonctionnement des moulins, formant des moulages sur le bois. Ces moulages sont préservés et fournissent des informations uniques sur la fréquence d'utilisation et de maintenance des moulins, et même sur la structure des chambres de la roue hydraulique. Les séries chronologiques d'isotopes stables des gisements de carbonate révèlent que l'activité de l'usine était régulièrement interrompue pendant plusieurs mois. Cela suggère fortement que le complexe de la minoterie n'était pas utilisé pour fournir régulièrement de la farine à un grand centre de population, comme on le pensait auparavant, mais servait probablement à produire du biscuit de mer non périssable pour les ports à proximité."
Reconstitution du complexe de Barbegal, illustration in Sürmelihindi G et al (2018), art cit.
Et pourtant, selon nos critères modernes, cette usine antique avait une puissance très modeste.
Le débit de l'aqueduc a été estimé entre 240 et 1000 litres par seconde. Le dénivelé exploité par les moulins est de 18 mètres. La puissance maximale brute de l'aménagement devait être de l'ordre de 50 kW, la puissance nette encore moindre en raison de pertes de charge dans les goulottes d'amenée et les roues. Il a été proposé une puissance efficace de l'ordre de 32 kW et une capacité quotidienne de production de 4,5 tonnes de mouture (Sellin 1983).
A titre de comparaison, le barrage le plus puissant de France (Grand-Maison en Isère) aune puissance de 1 800 000 kW, soit 30 000 fois supérieure. On voit combien nos économies modernes dépendent d'un usage intensif de l'énergie par rapport au monde antique, ou féodal (voir le remarquable essai de Smil 2017).
Références :
Sürmelihindi G et al (2018), The second century CE Roman watermills of Barbegal: Unraveling the enigma of one of the oldest industrial complexes, Science Advances, DOI: 10.1126/sciadv.aar3620
Greene K (2000), Technological Innovation and Economic Progress in the Ancient World: M.I. Finley Re-Considered, The Economic History Review, New Series, 53, 1, 29-59.
Sellin RHJ (1983), The large Roman water mill at Barbegal (France), History of Technology, 8, 91-109
Smil V (2017), Energy and civilization. A history, MIT Press, 552 p.