Le lobby de la pêche est le principal initiateur de la réforme de continuité écologique en France, et le chantre de la casse des ouvrages hydrauliques. Dans les Pyrénées-Atlantiques, la fédération de pêche s'est mise en quête d'ouvrages à détruire. Un cap est franchi avec l'objectif d'effacer aussi un seuil naturel en rivière, sur financement public de l'Agence de l'eau Adour-Garonne. Les nombreux pêcheurs de terrain qui apprécient souvent les ouvrages et aspirent à des rapports paisibles avec les autres usagers vont-ils tolérer longtemps la dégradation de leur image par ce genre de postures intégristes?
Un lecteur nous a fait parvenir le compte-rendu du dernier conseil d'administration (septembre 2016) de la Fédération de pêche 64 (accessible à ce lien). On peut y lire l'extrait suivant :
Quand l'Agence de l'eau Adour-Garonne propose de dilapider l'argent public en finançant à 100% la destruction du patrimoine hydraulique de son bassin (voir l'article sur cette scandaleuse prime à la casse), les officiels de la pêche sont bien évidemment les premiers à répondre à l'appel puisque leur lobby est le principal instigateur et le principal bénéficiaire de la réforme française de continuité écologique.
Neuf seuils, pour l'essentiel des moulins, vont donc être la cible des velléités de destruction des pêcheurs pyrénéens. Coût estimé : 135.000 euros d'études, 470.000 euros de travaux et une embauche (à financement Agence) pour suivre ces destructions. Rappelons que de nombreux gaves de la région ont été équipés au XXe siècle d'usines hydro-électriques ayant modifié substantiellement la morphologie et l'hydrologie, de sorte que l'intérêt écologique de cette traque aux moulins anciens sur des affluents modestes laisse sceptique sur le gain réel.
Il serait intéressant de connaître la manière dont "l'accord des propriétaires" est obtenu par la Fédération de pêche, vu les procédés douteux si souvent employés (défaut d'information sur le droit d'eau et sa valeur foncière, chantage sur des risques de travaux lourds non subventionnés ou d'amende, etc.). On observe qu'il a fallu des "brigades vertes", un stagiaire et 5 mois de travail pour aller traquer quelques moulins à détruire, les volontaires ne se bousculant manifestement pas au portillon de l'appel d'offres de l'Agence de l'eau.
Le point le plus notable de ce document est certainement l'objectif avancé et assumé de détruire un seuil naturel en rivière, présenté comme un "verrou". Le lobby s'en félicite: "Il s'agirait d'une première en France". Espoir de faire des émules? Quand la nature fait mal les choses, c'est elle que l'on est prêt à corriger. Il est vrai que d'autres défendent de prétendues "rivières sauvages" en dynamitant leurs ouvrages ; un petit milieu, ivre du pouvoir que lui ont donné les dérives administratives de la continuité écologique, a perdu le sens des limites.
Sous le vernis écologique...
Le lobby de la pêche prospère sur la subvention publique au service de ses intérêts et de sa vision singulière de la "protection des milieux aquatiques". Car sous le vernis "écologique" qu'il affiche si ostensiblement, tout n'est pas vert dans le loisir pêche :
Entendons-nous bien : la pêche est une activité sociale et économique légitime, elle a un rôle louable d'animation auprès des jeunes, ses altérations des milieux restent a priori mineures par rapport à d'autres impacts. Et nous ne versons pas pour notre part dans l'intégrisme de la nature-musée intouchable que certains chevaliers blancs portent en étendard. Une gestion intelligente de la rivière doit être capable de tolérer ses différents usages en cherchant à limiter raisonnablement leurs dommages. Mais quand ses représentants officiels viennent donner des leçons de morale écologique en cassant des chaussées de moulin et maintenant en projetant de détruire des seuils naturels, la pêche devient simplement un lobby sectaire dont les autres usagers de l'eau n'ont pas à supporter la nuisance et le double standard. D'autant que c'est l'exploitation de droits de pêche ne lui appartenant pas et la subvention publique qui nourrissent ce lobby.
(1) Dans le PDPG (plan départemental piscicole) en cours de cette Fédération 64, on peut lire : "essais d’implantation de l’Ombre commun (OBR) sur le gave de Pau depuis 2006 (15000 ombrets/an)". L'ombre est un poisson du centre-est de l'Europe et n'est pas natif de ce bassin. Mais comme sa pêche est tolérée après la fermeture de la truite, les pêcheurs apprécient beaucoup de poursuivre la saison. Tant pis si l'on introduit des espèces étrangères dans des bassins dont on affirme vouloir défendre les "biotypologies". La même posture à géométrie variable s'observe avec les déversements d'ombres dans la Cure (voir cet article). L'écologie, c'est bien ; vendre de la carte de pêche pour remplir la caisse, c'est quand même mieux.
Un lecteur nous a fait parvenir le compte-rendu du dernier conseil d'administration (septembre 2016) de la Fédération de pêche 64 (accessible à ce lien). On peut y lire l'extrait suivant :
Quand l'Agence de l'eau Adour-Garonne propose de dilapider l'argent public en finançant à 100% la destruction du patrimoine hydraulique de son bassin (voir l'article sur cette scandaleuse prime à la casse), les officiels de la pêche sont bien évidemment les premiers à répondre à l'appel puisque leur lobby est le principal instigateur et le principal bénéficiaire de la réforme française de continuité écologique.
Neuf seuils, pour l'essentiel des moulins, vont donc être la cible des velléités de destruction des pêcheurs pyrénéens. Coût estimé : 135.000 euros d'études, 470.000 euros de travaux et une embauche (à financement Agence) pour suivre ces destructions. Rappelons que de nombreux gaves de la région ont été équipés au XXe siècle d'usines hydro-électriques ayant modifié substantiellement la morphologie et l'hydrologie, de sorte que l'intérêt écologique de cette traque aux moulins anciens sur des affluents modestes laisse sceptique sur le gain réel.
Il serait intéressant de connaître la manière dont "l'accord des propriétaires" est obtenu par la Fédération de pêche, vu les procédés douteux si souvent employés (défaut d'information sur le droit d'eau et sa valeur foncière, chantage sur des risques de travaux lourds non subventionnés ou d'amende, etc.). On observe qu'il a fallu des "brigades vertes", un stagiaire et 5 mois de travail pour aller traquer quelques moulins à détruire, les volontaires ne se bousculant manifestement pas au portillon de l'appel d'offres de l'Agence de l'eau.
Le point le plus notable de ce document est certainement l'objectif avancé et assumé de détruire un seuil naturel en rivière, présenté comme un "verrou". Le lobby s'en félicite: "Il s'agirait d'une première en France". Espoir de faire des émules? Quand la nature fait mal les choses, c'est elle que l'on est prêt à corriger. Il est vrai que d'autres défendent de prétendues "rivières sauvages" en dynamitant leurs ouvrages ; un petit milieu, ivre du pouvoir que lui ont donné les dérives administratives de la continuité écologique, a perdu le sens des limites.
Sous le vernis écologique...
Le lobby de la pêche prospère sur la subvention publique au service de ses intérêts et de sa vision singulière de la "protection des milieux aquatiques". Car sous le vernis "écologique" qu'il affiche si ostensiblement, tout n'est pas vert dans le loisir pêche :
- encouragement à une activité consistant à stresser, blesser ou tuer des poissons pour le plaisir et non pour la subsistance, ce qui est à la base une manière pour le moins curieuse d'exprimer sa sensibilité à l'écologie et à la préservation des espèces;
- déversements massifs de poissons d'élevage, y compris non natifs du bassin (1);
- pollutions génétiques de souches sauvages (cet exemple sur les saumons de la Sélune où les pêcheurs ont justement posé en vertueux défenseurs de l'intégrité biotique);
- introductions de pathogènes par les empoissonnements, mais aussi par les bottes et les équipements (notamment les mordus de pêche à la mouche connus pour leur forte mobilité d'un bassin l'autre, par exemple suspicion sur les rivières franco-suisses);
- tir de cormorans au prétexte qu'ils sont meilleurs pêcheurs (et donc concurrents directs);
- destruction d'espèces jugées nuisibles en première catégorie mais qui se sont révélées des espèces menacées (l'anguille jusqu'en 1984, le brochet jusqu'en 2016);
- indifférence à la plupart des espèces non pisciaires (par exemple destruction d'étangs et plans d'eau sans inventaire complet de leur biodiversité);
- sur des bassins à saumons, aloses, truites de mer et autres amphihalins, mise en avant de l'intérêt "sportif" de la pêche aux migrateurs que l'on dit par ailleurs fragiles ou menacés, et incitation au tourisme halieutique pour venir de loin les traquer en masse, etc.
Entendons-nous bien : la pêche est une activité sociale et économique légitime, elle a un rôle louable d'animation auprès des jeunes, ses altérations des milieux restent a priori mineures par rapport à d'autres impacts. Et nous ne versons pas pour notre part dans l'intégrisme de la nature-musée intouchable que certains chevaliers blancs portent en étendard. Une gestion intelligente de la rivière doit être capable de tolérer ses différents usages en cherchant à limiter raisonnablement leurs dommages. Mais quand ses représentants officiels viennent donner des leçons de morale écologique en cassant des chaussées de moulin et maintenant en projetant de détruire des seuils naturels, la pêche devient simplement un lobby sectaire dont les autres usagers de l'eau n'ont pas à supporter la nuisance et le double standard. D'autant que c'est l'exploitation de droits de pêche ne lui appartenant pas et la subvention publique qui nourrissent ce lobby.
(1) Dans le PDPG (plan départemental piscicole) en cours de cette Fédération 64, on peut lire : "essais d’implantation de l’Ombre commun (OBR) sur le gave de Pau depuis 2006 (15000 ombrets/an)". L'ombre est un poisson du centre-est de l'Europe et n'est pas natif de ce bassin. Mais comme sa pêche est tolérée après la fermeture de la truite, les pêcheurs apprécient beaucoup de poursuivre la saison. Tant pis si l'on introduit des espèces étrangères dans des bassins dont on affirme vouloir défendre les "biotypologies". La même posture à géométrie variable s'observe avec les déversements d'ombres dans la Cure (voir cet article). L'écologie, c'est bien ; vendre de la carte de pêche pour remplir la caisse, c'est quand même mieux.