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La cour administrative de Bordeaux condamne aux dépens les fonctionnaires casseurs de droit d'eau

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La cour d'appel de Bordeaux donne tort au ministère de l'écologie qui voulait casser un droit d'eau fondé en titre pour motif de ruine partielle de l'ouvrage. Dans ce cas, le droit d'eau avait aussi été associé à une autorisation ultérieure (en 1939) et limitée dans le temps, mais les juges rappellent que cette limite était nulle car contraire au caractère perpétuel des droits fondés en titre. Cette affaire rappelle la réalité: les responsables du ministère de l'écologie ne cessent de harceler les moulins et étangs en essayant de contester leur existence légale ou de décourager leur remise en service, afin de les détruire ensuite comme "sans usage". Il est urgent que tous les propriétaires et riverains rejoignent des associations combatives pour répondre à ces abus de pouvoir, au lieu parfois de plier par méconnaissance du droit. Quant à l'idée d'une "politique apaisée" de continuité écologique, elle demande manifestement d'opérer une révolution culturelle chez certains fonctionnaires. Ou bien de confier le dossier à d'autres que ceux l'ayant fait échouer dans la brutalité et la défiance. Il est vain de nier la réalité des ouvrages ou d'espérer leur disparition, mais urgent de leur donner un sens conforme aux attentes de la gestion durable de l'eau et de la transition écologique.


Les faits
Une société a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler l'arrêté du préfet de l'Ariège du 28 octobre 2014 déclarant un moulin déchu de son droit fondé en titre, de reconnaître le droit fondé en titre attaché au moulin et de fixer sa consistance légale à 67 KW.

La procédure
Par un jugement n°1405931 du 20 janvier 2017, le tribunal administratif de Toulouse a annulé l'arrêté préfectoral du 28 octobre 2014 et reconnu le droit fondé en titre du moulin. Mais le ministère de la transition écologique et solidaire a fait appel.

Le jugement
La cour d'appel note que le déchaussement d'une partie du barrage par une crue n'empêche pas sa reconstruction et que les autres éléments nécessaires à l'usage de l'eau sont tous présents :
"Il résulte de l'instruction, et notamment du dossier établi par un bureau d'études et remis par la société au préfet en vue de l'établissement de la consistance légale du droit d'eau et de la déclaration des travaux nécessaires à la remise en eau du moulin, qu'après la crue de 1996, le barrage, d'une longueur initiale de 21,35 mètres, a été détruit dans sa partie aval sur un linéaire de 11 mètres et que la vanne de prise d'eau a disparu, de sorte que le Saurat a retrouvé son cours naturel et que le canal d'amenée a été en partie comblé. Il résulte toutefois également de l'instruction et notamment du dossier présenté par la société, que l'ouvrage de prise d'eau peut être restauré par la reconstruction des 11 mètres détruits, par l'installation d'une vanne d'entrée et d'une vanne de décharge et par une légère reprise de la crête de la partie subsistante du barrage. Il n'est par ailleurs pas contesté qu'ainsi qu'il est indiqué dans le dossier de la société, le tracé du canal d'amenée, d'une longueur de 255 mètres, est encore nettement marqué, que les bajoyers maçonnés de ce canal d'amenée, présents sur une longueur de 165 mètres, le reste du canal étant simplement creusé dans le terrain naturel, sont en place, que le canal de fuite est également en état, que le tracé du chenal de décharge est lui aussi visible, que la remise en eau ne nécessitera d'un curage des canaux, une restauration du fond et un retalutage et que l'une des deux roues à aubes présentes dans l'usine est encore en place. Dans ces conditions, comme l'a jugé le tribunal, et alors même qu'environ la moitié de l'ouvrage de prise d'eau doit être reconstruit et que l'exploitant projette de restaurer le bâtiment de l'usine, de refaire le bassin de mise en charge situé à l'amont immédiat de l'usine et d'installer une vis hydrodynamique, il ne peut être considéré que les dégradations subies par le moulin, quel que soit le coût des réparations, impliquent la reconstruction complète des éléments essentiels de l'ouvrage et qu'elles caractériseraient un état de ruine permettant de justifier la perte du droit fondé en titre."

Le juge note aussi qu'un précédent arrêté préfectoral de 1939 ayant limité l'autorisation dans le temps ne peut être opposé, car le caractère perpétuel du droit d'eau a préséance :
"L'installation a fait l'objet d'un arrêté préfectoral du 13 juillet 1939 qui prévoit une durée d'autorisation d'exploitation de 75 ans expirant le 13 juillet 2014 et pour une puissance maximale de 67 KW. L'article 19 de cet arrêté prévoyait que l'administration pouvait prononcer la déchéance de l'autorisation si l'exploitation cessait pendant cinq ans. Mais ainsi que l'ont estimé les premiers juges, en se fondant également sur les dispositions de l'arrêté du 13 juillet 1939 qui fixaient une durée d'utilisation du droit à 75 ans alors que le droit fondé en titre n'est pas limité dans le temps, le préfet de l'Ariège a entaché sa décision d'une erreur de droit."
Au final, "le ministre n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal a annulé l'arrêté du 28 octobre 2014, a reconnu l'existence du droit fondé en titre du moulin (...) et a fixé sa consistance légale".

Ici, le propriétaire du moulin ne s'en est pas laissé conter. Il avait les moyens psychologiques et économiques de résister à ce qu'il percevait à raison comme une erreur d'appréciation voire un abus de pouvoir. Mais combien de maîtres d'ouvrage isolés, connaissant mal le droit, croyant naïvement que l'autorité publique est sincère, ont été soumis à de telles pressions et ont abandonné, perdant et leur droit d'eau et leur ouvrage hydraulique dans la foulée? Toutes les associations locales doivent proposer une aide juridique aux moulins et autres ouvrages de leur rivière, afin de faire cesser ce genre de dérive et d'opposer un front uni aux administrations de l'eau. En particulier sur les cours d'eau classées en liste 2 au titre de la continuité écologique, où tous les ouvrages doivent être au bon niveau d'information par rapport à la loi, aux administrations, aux syndicats de bassin et aux fédérations de pêche.

Référence : CAA de Bordeaux, arrêt N°18BX00755, 16 juin 2020

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