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J'évapore, tu évapores, il évapore…

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En débit, l'évaporation estivale d'une petite retenue de moulin représente à peu près la consommation d'eau d'un équivalent-habitant. Autre image, il faudrait 20 millions de petits moulins évaporant à qui mieux mieux pour arriver à la quantité d'eau utilisée par la seule entreprise EDF pour refroidir ses centrales thermiques françaises. Affirmer que les moulins ont une grave responsabilité en ce domaine est donc assez grotesque. 


Lors d'une réunion sur la continuité écologique, un argument fuse : "une retenue évapore 6 mm par jour en été, c'est conséquent!". Nous avons rétorqué à notre interlocuteur que ce chiffre, à supposer qu'il soit exact (cela dépend en réalité de pas mal de facteurs), est au contraire assez négligeable.

Prenons une retenue de 1000 m2 (nous évoquions dans cet échange une petite rivière). Une perte de 6 mm représente 6 m3 ou 6000 litres par jour. Cela peut paraître impressionnant, mais un débit de rivière se mesure en litre par seconde, et il y a 86400 secondes dans une journée. L'évaporation représente une perte de 0,07 l/s. Il faut comparer ce chiffre avec le débit d'étiage de la rivière, qui se mesure habituellement en dizaines à centaines de l/s pour les petits cours d'eau.

Une moyen mnémotechnique assez simple : l'évaporation estivale d'une petite retenue de 1000 m2 est sensiblement équivalente à la consommation d'eau d'un Français (qui représente un débit moyen d'usage lissé de 0,06 l/s, toutes activités du territoire confondues et rapportées à la population).

Autre ordre de grandeur : le parc thermique d'EDF (nucléaire, gaz, charbon) consomme 42 milliards de m3 d'eau par an pour se refroidir (source EDF 2007).  Soit 1,3 million de litres par seconde, l'équivalent de ce qu'évaporeraient… 20 millions de petits moulins.

Ajoutons que, comme l'observent usuellement les propriétaires de ces moulins, l'évaporation contribue ensuite à la condensation qui profite grandement à la végétation alentour.

Moralité : on a compris que le Ministère, en désespoir de sauver sa très impopulaire réforme de continuité écologique, a lancé comme (absurde) élément de langage la responsabilité écrasante des moulins dans une situation de réchauffement climatique. Mais même pour prétendre que son chien a la rage avant de le mener à l'abattoir, il faudra faire un petit effort. A trop jouer avec ce catastrophisme déplacé, on ne sert vraiment pas la cause de l'écologie.

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Illustration : tours de refroidissement de la centrale de Saint-Laurent-des-Eaux, Wikimedia Commons, CC BY-SA 3.0. Qui, incidemment, a rejeté un peu de plutonium dans la Loire (surnommée sans rire "le dernier fleuve sauvage d'Europe").

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