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Les seuils dénitrifient les rivières (Cisowska et Hutchins 2016)

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Il existe déjà une abondante littérature scientifique sur le rôle positif des barrages en terme d'épuration des excès de nutriments dans les rivières (voir notre synthèse). Une nouvelle étude de modélisation confirme cet effet et appelle à redéfinir avec plus de précision le bon compromis entre restauration d'habitat et dénitrification. Mais peut-on espérer ce ré-examen de la part de l'Onema et des Agences de l'eau, qui ont trompé pendant 10 ans le public en prétendant que les seuils et barrages nuisent à l'auto-épuration des rivières?

Les deux auteurs de l'étude (I. Cisowska et M.G. Hutchins) rappellent que les programmes d'effacement ou aménagement d'obstacles ont des dimensions incontestablement positives sur certains paramètres de qualité du milieu, surtout la faune piscicole à forte dispersion vers l'amont, qui fait l'objet d'une attention particulière du gestionnaire. Ils soulignent aussi que le maintien des seuils peut aussi avoir des effets positifs, comme la régulation des débits ou l'aération aval avec des hausses observables d'oxygène dissous. La question des services rendus est dès lors "impossible à traiter sans des études détaillées et spécifiques à chaque site".


Les auteurs ont analysé le cas particulier d'un seuil sur la rivière Nidd, affluent de l'Ouse dans le Yorkshire (Royaume-Uni). Ce seuil a été supprimé en 1999. Les auteurs ont procédé à une modélisation hydraulique de l'ouvrage et de la zone d'influence amont-aval, sur un tronçon de 15,8 km. Des mesures de débit et de concentration de nitrates ont été effectuées en 1997, 2000 et 2013, pour caler le modèle.

Selon les résultats de ce modèle, le seuil permet une dénitrification comprise entre 382 et 812 kg N sur les deux années complètes modélisées (1997 et 2000, dans ce dernier cas en hypothèse contrefactuelle d'un maintien). Les bénéfices les plus importants s'observent en été. Le maintien du seuil aurait été équivalent à épurer les rejets provenant de 9 à 19 ha de terres cultivées dans son voisinage immédiat.

"Nos simulations par modèle montrent que les seuils sont bénéfiques en terme de dénitrification, mais seulement dans une petite mesure, concluent les auteurs. Les bénéfices sont largement observés pendant les périodes estivales de faible débit (…) Il serait important de mettre ces résultats sur les modifications de nitrate en perspective avec d'autres mesures de qualité de l'eau comme le phosphore, le phytoplancton et les sédiments. (…) Dans le contexte d'une proposition de nombreux effacements de seuils sur les rivières européennes, une analyse rigoureuse du compromis entre dénitrification et amélioration d'habitat doit être entreprise".

Mais n'ayez crainte, amis européens : en France, nous avons la chance d'avoir des gestionnaires qui agissent massivement avant d'observer les résultats d'expériences locales, et qui se permettent de statuer de manière définitive avant d'attendre les conclusions de la recherche scientifique. Grâce à nos apprentis sorciers hexagonaux, vous pourrez donc venir bientôt faire des analyses chez nous, dans le champ de ruine des rivières renaturées à la pelleteuse par une technocratie pressée et par ses courtisans subventionnés – rivières qui se trouvent aussi massivement soumises aux nutriments, pesticides, perturbateurs neuro-endocriniens, microplastiques et autres polluants chimiques, ce qui en fera certainement des objets d'études riches d'enseignements.

Référence : Cisowska I et MG Hutchins (2016), The effect of weirs on nutrient concentrations, Science of the Total Environment, 542, 997–1003

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