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Aidez-nous à convaincre le parlement européen de protéger les ouvrages hydrauliques

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Des experts militants et lobbies favorables à la destruction systématique des ouvrages hydrauliques ont poussé la direction environnement de la commission européenne à déposer un projet de règlementation appelant notamment au "libre écoulement" des rivières, par quoi il faut entendre en réalité la suppression des plans d'eau, retenues, étangs, lacs et canaux. C'est une folie en pleine crise de l'eau, de l'énergie et du climat, mais les parlementaires risquent de se laisser abuser par les bonnes intentions affichées du texte. Hydrauxois et la coordination Eaux & Rivières humaines passent à l'offensive cette semaine avec une campagne d'information des parlementaires et fonctionnaires européens sur les problèmes, échecs et contradictions de la continuité écologique, ainsi que la nécessaire reconnaissance des écosystèmes anthropiques de retenues et canaux. Mais nous avons besoin de votre aide pour cette campagne, qui dépasse les simples capacités de notre bénévolat!


Les riverains attachés aux ouvrages hydrauliques de moulins, forges, étangs, plans d'eau connaissent désormais la chanson : des bureaucraties lointaines prennent des décisions sans jamais les consulter, et quand ces décisions arrivent sur le terrain, c'est le malentendu et le conflit.

Cette dérive est en train de se reproduire en ce moment même. La commission européenne (DG de l'environnement) a déposé au parlement un projet de "restauration de la nature". Sous ce label anodin, et potentiellement populaire, se cache dans le cas particulier des cours d'eau l'idéologie de la destruction des ouvrages hydrauliques au nom du retour à la rivière sauvage. Les mêmes lobbies et experts militants que nous voyons à l'oeuvre en France agissent au niveau des administrations de l'Union européenne. A défaut de pouvoir convaincre les citoyens du bien-fondé de leurs vues sur le terrain, ils essaient d'imposer des normes surplombantes auprès des pouvoirs centraux. Et de fait, les règlementations européennes s'imposent aux droits nationaux.

Rappelons que la destruction des ouvrages hydrauliques a de nombreux effets pervers : perte de ressource en eau, disparition d'outils de régulation des crues et sécheresses, suppression de capacités hydro-électriques, bilan carbone déplorable, réduction de l'auto-épuration du cours d'eau, disparition d'écosystèmes anthropiques et de services écosystémiques, conflictualité sociale, négation du patrimoine historique, culturel, paysager et industriel.

Concernant les ouvrages ayant un réel impact sur des poissons migrateurs menacés, il existe des solutions ayant démontré une efficacité correcte : gestion de vannes, passes à poisson, rivière de contournement. Il est inutile et contre-productif de tout détruire pour aider les saumons ou les anguilles. 

Face à cette manoeuvre de coulisses, Hydrauxois et la coordination Eaux & Rivières humaines lancent une campagne d'information. Celle-ci a pour but d'expliquer aux parlementaires et fonctionnaires de l'Union européenne :
- les valeurs multiples y compris écologiques des ouvrages hydrauliques,
- les critiques nombreuses menées par des scientifiques contre la représentation d'une "nature" qui serait indépendante de l'humain voire opposée à lui,
- la nécessité de reconnaître les biodiversités et fonctionnalités attachées aux écosystèmes créés par les humains,
- le bilan très controversé de la "continuité écologique" en France, laboratoire de l'échec d'une écologie théorique hors-sol et non construite avec les riverains,
- la nécessité d'imposer la prime normative à la ressource en eau et en énergie en cas de conflit de norme avec des chantiers de restaurations de milieux, eu égard aux crises existentielles que nous affrontons.

Cette tâche appelle un chargé de campagne, étant donné le volume des envois, suivis et animations. Elle dépasse la capacité de notre bénévolat.

Nous vous demandons donc deux types de soutien :
- un don même modeste à Hydrauxois, qui sera financeur principal de l'opération (don par Paypal ci-contre ou par chèque à l'adresse de l'association),
- la communication de tout nom et adresse électronique de décideurs européens de votre connaissance que nous pourrions contacter.

Nos adversaires sont puissants et subventionnés. Mais nous sommes résolus. Nous ne laisserons plus les autres décider à notre place de l'avenir de nos cadres de vie et des enjeux de l'eau. Les ouvrages hydrauliques seront indispensables face aux défis du 21e siècle comme ils le sont depuis des millénaires pour les sociétés humaines : aidez-nous à en convaincre l'Europe ! 

Merci d'avance de votre aide et de la diffusion de ce message.

Premier texte envoyé aux décideurs européens (version FR/EN) : à télécharger (pdf) 



Prise de position sur la proposition européenne de « restauration de la nature » COM(2022) 304 final 

Canaux, moulins, étangs, lacs ne sont pas les ennemis mais les alliés de l’écologie
Un autre regard sur les ouvrages hydrauliques est nécessaire

L’Union européenne envisage une directive de restauration de la nature. Nous nous félicitons des avancées du Pacte vert dont ce projet de régulation est une partie. 

Ce projet de directive comporte notamment des aspects normatifs sur la gestion des ouvrages en rivière. Ces ouvrages sont de diverses natures : gué, seuil de moulin, digue d’étang, aménagements de patrimoine historique, barrages à usages nombreux (énergie, irrigation, eau potable, loisir). Le projet oppose à ces ouvrages l’idéal d’un « écoulement libre ». 

Le texte en l’état pose divers problèmes au regard des connaissances scientifiques et des expériences de gestion des ouvrages hydrauliques. Nous demandons aux parlementaires européens d’en prendre conscience et de faire évoluer les propositions de la Commission.

La nature et l’humain ne sont pas séparés
Le texte préparé par la direction générale de l’environnement de la Commission sépare et oppose d’un point de vue normatif la nature et la société. Tout ce qui est vu comme intervention humaine sur la nature est analysé comme un impact. L’état de référence de la nature est vu comme une nature sans humain, ce qui devient un objectif normatif. Ce point de vue a donné lieu à de nombreuses et croissantes critiques dans la littérature scientifique. Les milieux aquatiques européens sont façonnés de longue date par les activités humaines, de sorte que leur nature actuelle est « hybride », une co-construction naturelle et humaine (Lespez et al 2015, Verstraeten  et al 2017, Brown et al 2018). La notion d’un état de référence est de ce fait problématique, en particulier à l’heure où le changement climatique modifie ce qui était l’état historique antérieur, considéré comme référence naturelle des bassins versants (Bouleau et Pont 2015). L’ontologie naturaliste séparant nature et humain méconnaît la diversité des appropriations et interprétations de l’environnement (Linton et Krueger 2020, Lévêque 2020, Collard et al 2021).

A retenir : davantage que « restaurer la nature », il s’agit aujourd’hui d’améliorer la manière dont les humains et les non-humains co-existent dans des milieux en évolution permanente. La question que l'on doit se poser  est : "quelles natures voulons-nous?" selon des critères écologiques, sociaux, économiques, esthétiques et éthiques.

Les ouvrages en rivière créent aussi des écosystèmes
Un ouvrage hydraulique n’est pas réductible à un « impact » : il crée aussi un nouveau milieu. L’ouvrage est associé à des retenues, canaux, annexes aquatiques ou humides.  Ces milieux ont été appelés dans la littérature scientifique des nouveaux écosystèmes (Hobbs et al 2006, Backstrom et al 2018) ou des écosystèmes culturels anthropiques (Evans et Davies 2018). Il a été récemment suggéré que les petits ouvrages en rivières sont à interpréter comme des écotones, des milieux de transition à gradients environnementaux (Donati et al 2022). On a également souligné que les milieux créés par ces ouvrages (retenues, canaux, zones humides), au nombre de 500 000 pour un pays comme la France, sont aujourd’hui absents du cadre gestionnaire de la directive cadre européenne sur l’eau, souvent orphelins d’études et de gestion (Touchart et Bartout 2020). Dans certains cas, une rivière avec ouvrage entre dans un état écologique alternatif stable : elle ne dispose pas de son ancienne dynamique naturelle, mais réorganise les flux énergétiques, sédimentaires et les communautés biotiques dans une nouvelle configuration (Skalak et al 2017). Des milieux d’origine artificielle ont des effets bénéfiques sur certains aspects de la biodiversité aquatique, que ce soit des canaux (Guivier et al 2019), des réservoirs locaux (Fait et al 2020), des étangs (Wezel et al 2014), des biefs de moulin (Sousa et al 2019), des petits plans d’eau et autres milieux hydrauliques humains (Chester et Robson 2013, Davies et al 2008, Hill et al 2018, Bolpagni et al 2019, Vilenica 2020, Koschorreck 2020, Zamora-Marín et al. 2021).

A retenir : un ouvrage hydraulique n’est pas une pollution ou une disparition de milieux aquatiques et humides, il est créateur de tels milieux et héberge aussi de la biodiversité, parfois supérieure à celle du milieu antérieur. Le changement hydroclimatique accentue le rôle de refuge et ressource que peuvent avoir ces ouvrages, y compris pour une biodiversité terrestre environnante.

Les ouvrages en rivière rendent de nombreux services écosystémiques et sociaux
En analysant un ouvrage hydraulique en rivière comme étant uniquement un impact dont l’idéal serait la suppression, on méconnaît de nombreux travaux scientifiques ayant montré que ces ouvrages peuvent avoir des intérêts économiques et sociaux, mais aussi écologiques. Une recherche a montré que les petits plans d’eau  peuvent remplir jusqu’à 39 services écosystémiques (Janssen et al 2020). 
A titre d’exemples :
• Les ouvrages, même modestes, peuvent apporter une contribution significative à la transition énergétique bas carbone par l’équipement hydro-électrique (Punys et al 2019, Quaranta et el 2022)
• Les ouvrages contribuent à dépolluer les cours d’eau des intrants azote et phosphore (Passy 2012, Cisowska et Hutchins 2016), parfois des pesticides (Gaillard et al 2016, Four et al 2019)
• Les ouvrages et leurs annexes de types canaux, fossés, maintiennent une ligne d’eau en étiage, alimentent les nappes, retiennent l’eau d’hiver, alors que leur suppression a l’effet inverse, incise le lit, accélère l’écoulement (Aspe et al 2014, Maaß et Schüttrumpf 2019, Podgórski et Szatten 2020). Le barrage peut être aussi vu et géré à l’avenir comme refuge face au changement climatique (Beatty et al 2017).
• Les ouvrages sont insérés dans un patrimoine culturel, sociétal et historique qui est un mode de co-existence attentive aux milieux naturels (Lejon et al 2009, Sneddon et al 2017, Dabrowski et al 2022).
• La suppression des ouvrages dans les pays où elle a été fortement soutenue soulève des controverses sociales et produit parfois des résultats discutables (Barraud et Garmaine coord 2017, Bravard et Lévêque 2020).

A retenir : l’ensemble des bénéfices des ouvrages en rivières doivent être analysés avant intervention, avec près de 40 services écosystémiques potentiels pour la société. 

Des évolutions du droit sont nécessaires
A la lumière de ces travaux scientifiques qui confortent l’expérience de terrain des propriétaires, riverains et gestionnaires d’ouvrages hydrauliques, nous sollicitons que plusieurs points soient inscrits dans le projet de loi de restauration de la nature :
• La reconnaissance des écosystèmes anthropiques et culturels par le droit européen, avec nécessité de les étudier et les protéger eux aussi.
• L’obligation de procéder à une analyse complète et sincère des services écosystémiques, non limitée à la biodiversité endémique mais incluant toutes les dimensions socio-écologiques.
• La nécessité de mettre en regard les enjeux de biodiversité avec les enjeux de l’énergie, de l’eau et du climat, la lutte contre le changement climatique (prévention, adaptation) devant avoir priorité normative en cas de conflit de normes.
• L’urgence d’additionner et non opposer les solutions fondées sur la nature et les solutions fondées sur la culture / la technique pour garantir la gestion de l’eau comme ressource, alors que nous faisons face à des épisodes critiques de sécheresse ou de crue.

(Références scientifiques complètes dans le pdf)

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