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Les ouvrages hydrauliques réchauffent ou refroidissent l'eau selon leur nature (Seyedhashemi et al 2021)

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Une étude française sur le bassin de Loire montre que, par rapport à une rivière non fragmentée, la présence de grands barrages tend à diminuer la température estivale de l'eau de 2°C, celle de succession de retenues plus petites tend à l'augmenter de 2,3°C. Cette moyenne recouvre néanmoins des dispersions notables dans le cas des rivières avec ou sans retenue. 

Le barrage de Naussac, situé dans la zone d'étude (CC BY-SA 2.0, Dimitri)

Hanieh Seyedhashemi et ses collègues ont étudié dans le bassin de Loire la signature thermique des rivières selon la présence de grands barrages, de retenues de plus petites dimensions ou d'un style fluvial plus naturel. 

Ils introduisent ainsi l'objet de leur recherche : "Les corridors fluviaux stockent, transforment et transportent la masse et l'énergie depuis les sources vers les océans. Bien que les rivières soient généralement analysées comme des systèmes lotiques, la distribution des plans d'eau lentiques (p. ex. lacs, réservoirs, étangs) le long du continuum fluvial est récemment apparue comme un facteur critique dans l'élimination de l'azote (Harrison et al., 2009; Schmadel et al., 2018) et le stockage du phosphore (Grantz et al., 2014) et des sédiments (Vörösmarty et al., 2003). Une préoccupation émergente concerne les effets cumulatifs des systèmes lentiques sur la température de l'eau des cours d'eau et des rivières, qui est un paramètre critique affectant l'eutrophisation des plans d'eau (Minaudo et al., 2018; Le Moal et al., 2019) et la répartition des communautés aquatiques (Cox et Rutherford, 2000; Poole et Berman, 2001; Ducharne, 2008)."

Les effets des masses d'eau lentiques sur la température des cours d'eau dépendent fortement de leurs caractéristiques individuelles et de leurs distributions spatiales. Ce qui complique les échelles d'analyse. Les auteurs proposent d'étudier le rapport entre température de l'air et de l'eau dans les bassins pour comprendre la dynamique des échanges de chaleur selon que les rivières sont fragmentées par divers types de retenues. 

Voici le résumé de leur recherche :

"Les ouvrages anthropiques (par exemple les grands barrages, les petits réservoirs et les retenues) se multiplient à l'échelle mondiale, influençant les régimes de température en aval de diverses manières, qui dépendent de leur structure et de leur position le long du continuum fluvial. 

En raison des multiples réponses thermiques en aval, il y a peu d'études caractérisant les tailles d'effet cumulatif à l'échelle du bassin versant. Ici, nous introduisons cinq indicateurs thermiques basés sur la relation de la température eau-air qui, ensemble, peuvent identifier les signatures thermiques modifiées par des barrages et des retenues. Nous avons utilisé cette approche de signature thermique pour évaluer un ensemble de données régionales de 330 séries chronologiques quotidiennes de température des cours d'eau provenant de stations du bassin de la Loire, en France, de 2008 à 2018. Ce bassin (100000 km2) est l'un des plus grands bassins versants européens avec des caractéristiques anthropiques et naturelles contratsées. Les signatures thermiques dérivées ont été contre-validées avec plusieurs caractéristiques connues du bassin versant, qui ont fortement soutenu leur séparation en signatures de type barrages, retenues et naturelles. Nous caractérisons le régime thermique de chaque signature thermique et nous le contextualisons à l'aide d'un ensemble de métriques thermiques pertinentes sur le plan écologique. 

Les résultats indiquent que les grands barrages ont réduit la température estivale des cours d'eau de 2 ° C et retardé le pic annuel de température des cours d'eau de 23 jours par rapport aux régimes naturels. En revanche, les effets cumulatifs des retenues en amont ont augmenté la température estivale des cours d'eau de 2,3 ° C et accru la synchronisation avec les régimes de température de l'air. Ces signatures thermiques permettent ainsi d'identifier et de quantifier les influences thermiques et écologiques en aval de différents types d'infrastructures anthropiques, sans information préalable sur la source de modification et les conditions de température de l'eau en amont."

Ce graphique montre la différence entre température de l'air (en gris) et température de l'eau dans les rivières à barrages (rouge), à retenues (vertes) ou de type naturel (bleu).

Extrait de Seyedhashemi et al 2021, art cit.


Cet autre graphique montre les variations observées selon les cours d'eau pour la température de l'eau en été (Tw summer), la température maximale mensuelle (maxTw), le nombre de jours à température > 20°C ou 15°C (DTw20), la différence maximale de température de l'eau dans l'année (max deltaTw), avec les mêmes codes couleur (rouge barrages, vert retenues, bleu naturel).


Extrait de Seyedhashemi et al 2021, art cit.

On observe au passage que les distributions de température d'été de l'eau (Tw) et températures maximales d'été (max Tw) se recoupent pour un grand nombre des sites naturels ou avec retenues. 

Concernant les retenues, les auteurs signalent notamment dans leur article que la couverture arborée a une influence négative notable sur la température. 

Discussion
Cette recherche confirme d'autres travaux ayant montré que les grands barrages tendent à refroidir l'eau quand les petits tendant à la réchauffer. Les déterminants sont notamment la hauteur de la colonne d'eau de retenue, la largeur de la surface de retenue, la présence ou non d'arbres en berge de la retenue. 

Il serait intéressant d'affiner le travail en précisant la nature des retenues. Le texte signale simplement une hauteur de moins de 15 m (pour les retenues hors barrage), mais cela laisse de la marge d'interprétation. Il existe en effet plusieurs dizaines de milliers d'ouvrages sur les rivières françaises, allant  de simples chaussées de moulins de 0,5 de hauteur à la retenue à peine perceptible jusqu'à des lacs de centaines d'hectares. Une prochaine étape pourrait être d'affiner le cas des rivières à retenue (le plus fréquent en France) pour analyser plus en détail les facteurs faisant varier la température, comme la densité, la surface, la spatialisation, la végétalisation de ces retenues sur le continuum.  

Référence :  Seyedhashemi H et al (2021), Thermal signatures identify the influence of dams and ponds on stream temperature at the regional scale, Science of the Total Environment, 766, 142667

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